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@ Selim
2025-04-08 18:19:43đ¶ Je vais bientĂŽt devenir papa.
Et ces derniers temps, une question me hante plus que je ne lâaurais cru : faut-il publier des photos de son enfant sur les rĂ©seaux sociaux ?Câest une rĂ©flexion que je nâavais jamais vraiment poussĂ©e avant.
Mais aujourdâhui, elle me semble incontournable. Parce quâĂ lâĂšre des smartphones et des stories, poster devient un rĂ©flexe. On documente tout : les premiĂšres Ă©chographies, la chambre quâon prĂ©pare, les petits vĂȘtements, les premiers sourires⊠Et lâenvie de partager est naturelle. Câest beau, câest Ă©mouvant, on a envie de dire au monde quâon est fier, quâon est heureux.Mais voilĂ .
Plus jây pense, plus je me dis que cette impulsion entre en tension avec dâautres principes qui me tiennent tout autant Ă cĆur.Dâabord, la question du consentement.
Mon enfant ne pourra pas me dire : « Je suis dâaccord pour que tu postes cette photo ». Ni maintenant, ni dans quelques annĂ©es quand les images auront dĂ©jĂ circulĂ©. Il nâaura pas choisi de grandir avec une identitĂ© numĂ©rique crĂ©Ă©e pour lui, sans lui.
Ensuite, la protection de sa vie privée.
Une photo postĂ©e, mĂȘme dans un cadre soi-disant « privĂ© », peut ĂȘtre capturĂ©e, partagĂ©e, dĂ©tournĂ©e, utilisĂ©e hors contexte. Il nây a pas de bouton magique pour effacer ce qui est dĂ©jĂ parti sur les serveurs dâune plateforme.
Et aujourdâhui, il faut aussi parler de lâusage de ces images par les intelligences artificielles.
De nombreuses IA sont entraĂźnĂ©es en partie Ă partir de donnĂ©es en ligne, y compris des photos. Ce qui signifie que le visage de mon enfant, sâil est mis en ligne, pourrait un jour se retrouver dans un dataset dâapprentissage, intĂ©grĂ© Ă un modĂšle gĂ©nĂ©ratif, voire utilisĂ© pour crĂ©er des deepfakes ou pour « entraĂźner » des applications que je nâai jamais autorisĂ©es Ă le voir.
On ne parle plus seulement de vie privĂ©e. On parle dâexploitation, dâautomatisation, de rĂ©utilisation potentiellement incontrĂŽlable.Et puis, il y a la dimension Ă©ducative.
Quel exemple est-ce que je donne si je lui demande plus tard dâĂȘtre prudent sur Internet, alors que moi-mĂȘme jâaurais documentĂ© toute son enfance en ligne, sans filtre ? Si je veux quâil comprenne ce que veut dire « intimitĂ© », je dois sans doute commencer par la respecter dĂšs ses premiers jours.
Ce nâest pas un jugement. Je comprends lâĂ©lan de publier, de partager, de cĂ©lĂ©brer.
Mais je crois que lâĂ©poque demande quâon sâarrĂȘte deux secondes avant de poster. Et quâon se demande :
â Pourquoi est-ce que je partage cette image ?
â Ă qui est-ce quâelle appartient, au fond ?
â Et quel monde numĂ©rique je construis pour mon enfant, dĂšs aujourdâhui ?Et vous, parents ou futurs parents, vous avez rĂ©flĂ©chi à ça ? Vous partagez ? Vous vous retenez ?
Je serais curieux de lire vos retours. đ